Aude Moreau, joueuse historique du club, a quitté l'ASSE en ce début de saison. Après avoir retrouvé un nouveau club (Le Puy, R1) et les terrains début octobre, elle a tenu à rédiger un communiqué pour expliquer les raisons de son départ. Etant donné la longueur de ce communiqué, celui-ci sera publié en 3 parties. Voici la première, qui revient sur la carrière d'Aude à l'ASSE, ainsi que les circonstances de sa blessure en janvier. Dans cet article, le terme "président" représente le président de l'association ASSE et non pas le président de l'ASSE. Partie 1 Après 7 saisons, 157 matchs dont 138 matchs de championnat soit 11710 minutes jouées, je tourne la page ASSE. J’ai tenu à m’exprimer pour donner les vraies raisons de mon départ puisque certaines personnes m’ont posé la question. Par ailleurs, je ne souhaite pas que ce qui m’est arrivé se reproduise avec d’autres joueuses. Quand on a donné autant de sa personne pour un club et qu’on vous remercie comme je l’ai été, c’est vraiment triste. Un petit résumé de mes années à l’ASSE : Tout commence en 2010, j’ai 20 ans, j’intègre une école d’ingénieur, l’INSA de Lyon, et je signe à l’ASSE. Je vais évoluer dans le club pendant 4 saisons. Je passe 4 super saisons : nous gagnons le Challenge de France en 2011, nous faisons une finale de Coupe de France en 2013. Les 2 dernières saisons, je suis nommée Capitaine suite à l’arrêt d’Astrid Chazal pour blessure. Je suis épanouie, il y a une super ambiance. Je réponds présente avec plaisir à toutes les sollicitations du club pour tout type d’évènements (Cœur-Vert, marraine de tournois, journée de la femme…) malgré le fait que j’habite à Lyon et que je passe beaucoup de temps dans les trajets. Pour aller aux entraînements, je quitte les cours à 16h et je rentre à 22h, 4 fois par semaine. Je passe 4h de ma journée dans les transports (tram, puis train, puis tram à l’aller, puis au retour) pour pouvoir m’entraîner. Vient la fin de mes études, je trouve un poste à Paris. En 2016-2017, après une super saison en D2 au Val d’Orge (FC Fleury), je décide de resigner à l’ASSE car je souhaite jouer en D1. Je me dis que je connais bien le club et que ça ne peut que bien se passer. Je finirai sûrement ma carrière là -bas. Malheureusement, nous descendons en D2 à l’issue de la saison. J’ai une proposition de Soyaux et de Fleury mais je décide de rester à l’ASSE. Je ne me vois pas quitter le club en le laissant en D2 et j’ai envie de remonter en D1. La saison d’après nous loupons la montée face à Dijon. Le coach de Dijon est intéressé par mon profil mais je choisis encore une fois de rester au club. Arrive alors la saison 2018-2019. Nous démarrons mal la saison mais nous nous rattrapons vite et sommes 1ères du classement à la trêve. Nous arrivons à garder notre première place face à Yzeure en Janvier. Je suis appelée en Equipe de France Militaire pour préparer les jeux mondiaux militaires et représenter mon pays, après avoir participé à la coupe du monde militaire au Texas à l’été 2018. Par respect pour le club, je demande l’autorisation à mon coach d’y participer. Il me la donne après avoir consulté le président. Il m’autorise donc à partir en sélection. Malheureusement, lors du match amical contre Orléans, une joueuse me tombe sur le pied. J’ai une double fracture du cunéiforme latéral et du 4e métatarse. Je suis très déçue de ne plus pouvoir jouer mais je ne peux malheureusement rien y faire. C’est à ce moment-là que tout commence. Tout d’abord, le président de l'association ASSE (et non pas le président de l'ASSE) décide de couper ma rémunération fixe. Etonnée par cette décision, j’essaye de comprendre les raisons de ce choix. Ma capitaine m’apprend alors que le président ne veut plus me rémunérer car je suis blessée et que je ne me suis pas blessée avec le club. J’appelle alors le président, il est très en colère. Je comprends sa colère et je lui explique ma déception d’avoir reçu ce coup et d’être blessée. En sélection, le programme était adapté de telle sorte qu'il y avait un match en D2 avant et après la sélection. Je ne pouvais pas prévoir qu’on me tomberait dessus, le staff de la sélection non plus d’ailleurs. Le président m’a alors accusée d’avoir joué plus d’une mi-temps, alors qu’ils avaient demandé à ce que je ne joue pas plus de 45 minutes, car je me suis blessée à la 75 ème minute. J’ai dû l’informer que j’avais seulement participé à la 2 ème mi-temps… Le président décide alors de me remettre ma rémunération fixe. Nous verrons par la suite pourquoi. Partie 2 Les mois passent, et nous loupons la montée d’un point. Pour me rétablir au mieux et le plus vite possible, je pars en rééducation au CERS de Capbreton pour 3 semaines, ce qui me fait manquer 3 semaines de travail. Il ne faut pas oublier qu’à l’ASSE la plupart des filles travaillent ou font des études. J’exerce le métier d’ingénieur commercial, un travail très prenant qui demande beaucoup d’investissement et beaucoup de travail. Les joueuses peuvent en témoigner, il n’y avait pas un weekend de déplacement où je ne bossais pas dans le bus. A la fin de ma rééducation, je me rends à mon entretien de fin de saison et c’est là que le sketch commence. Mon coach me dit qu’il souhaite me garder mais que le président veut me rémunérer au minimum. Il me dit alors qu’il a donc négocié pour moi afin d’obtenir une rémunération fixe brute de 400€ au lieu des 625€ que je percevais. Il m’annonce par ailleurs qu’un plafond de prime de match a été mis en place et comme ma prime de match est supérieure au plafond, celle-ci est ramenée au plafond. Surprise, je lui fais part de mon désaccord. Il est hors de question que j’accepte cette situation après toutes les années que j’ai passé au club et tout ce que j’ai donné pour ce club, autant sur le plan sportif que sur le plan humain. A cet instant, il a dû se dire : « Quelle haute estime d’elle-même !», vous comprendrez plus tard également. Le montant de la rémunération n’est pas un problème, je souhaite simplement être respectée. Comment réagiriez-vous si on vous annonçait qu’on baissait votre salaire de 35% au retour d‘un arrêt maladie ? Alors que je souhaite contacter le président pour m’expliquer de façon responsable, le coach me le déconseille en me disant que cela risque de l’énerver. Je décide alors de l’écouter. Le temps passe alors je relance de temps en temps le club car personne ne revient vers moi. Le coach m’annonce que le président ne veut rien entendre pour le moment mais que lui veut me garder pour continuer ce que l’on a construit depuis 2 ans. Afin d’être prête pour la reprise, je continue ma rééducation chez le kiné. Mais au moment de la reprise, je n’ai toujours aucune nouvelle, aucune discussion n’a eu lieu avec le président. Le coach excuse mon absence à l’entraînement en disant aux filles que je suis en vacances. C’est absolument faux. Je ne suis pas partie en vacances de tout l’été, j’ai passé l’été chez le kiné pour avancer ma rééducation. Je relance le coach pour savoir si la situation a évolué et si je peux avoir un rendez-vous avec le président… Il me répond qu’il pensait me voir passer à l’entrainement. Il me suggère ensuite de venir 2 fois par semaine à l’entrainement et d’intégrer le groupe en vue du stage de pré-saison pour montrer au président que je suis toujours concernée par l’équipe. A l’écoute de mon coach, je passe à l’entraînement le lendemain pour annoncer aux filles que je viens au stage. Mais dans la foulée, le coach me conduit dans son bureau et m’annonce qu’en fait il vaut mieux que je ne vienne pas au stage car cela risquerait d’énerver le président et que si je prends ma place dans le groupe et que je ne resigne pas au final, cela pourrait créer de la frustration dans le groupe. Il m’annonce également que le président est en vacances mais qu’il va lui demander une réponse pour le 25 août maximum car selon lui, cette situation a trop duré et il faut qu’on sache si une discussion est possible. Tout le monde sait que le stage de préparation est un moment important de la saison, normalement ma situation aurait déjà dû être réglée. Dire « Oui » ou « Non », je ne vois pas ce qu’il y a de compliqué. Mais je continue de me faire berner. Le 16 août, fin du stage, j’écris au coach car un supporter me demande si je suis partie de Sainté. Je suis embêtée et je ne sais pas quoi répondre. Il me dit à ce moment-là que finalement le président est en vacances jusqu’au 24 août. Je comprends alors que je n’aurai pas de réponse pour le 25 août alors qu’il m’avait dit qu’il demanderait une réponse au président pour cette date. Le 21 août, j’assiste au match amical à Chasse sur Rhône, je n’ai toujours aucune nouvelle. Je devrai donc relancer le club après 2 mois et demi sans réponse. rappel : le terme "président" représente le président de l'association ASSE et non pas le président de l'ASSE. Partie 3 Je passe à l’entraînement la semaine du dernier match amical contre le Servette de Genève. Le coach me dit qu’il ne peut rien faire, la seule solution est de parler au président lors du match. Je me rends au match pour parler au président qui a ignoré mes sollicitations jusque-là . Le président me dit : « Sportivement, on n'a plus besoin de toi, ça fait 2 ans qu’on ne monte pas, il faut changer les choses. ». Il m‘explique qu’il m’a remis ma rémunération fixe après ma blessure pour ne pas faire de vague. Le coach me demande le compte rendu de la conversation avec le président, puis il me dit qu’il va « lui voler dans les plumes » et lui rappeler que mon profil manque cruellement dans l’équipe. En parallèle, le kiné me dit qu’il est important que je reprenne le terrain pour ne pas prendre de retard dans la rééducation mais je n’ai pas de club pour cela. Je participe donc à un entrainement au Puy en Velay et à Saint Julien Chapteuil. Je remercie ces 2 clubs de m’avoir gentiment accueillie pour me permettre de commencer à reprendre le terrain. Je pensais avoir tout vu mais le ''meilleur'' était à venir. Le livre « Un an avec les vertes » sort et je découvre un passage sur ma blessure. Le coach s’est exprimé à la suite de ma blessure et voici l’extrait tiré du livre «Un an avec les vertes » écrit par Julien Gardon et Laurie Joanou : « Elle ne pense qu’à elle et a une haute estime d’elle-même. Elle a voulu y aller pour la gloire. Tant pis pour elle. ». A la suite de cette lecture, je n’ai plus aucune hésitation. Cela fait donc des mois que le coach me dit qu’il veut me garder alors qu’il pense ça de moi. Ce n’est pas possible, comment un coach voudrait-il garder une fille pareille dans son équipe ? J’ai toujours tout donné pour ce club sur le terrain et en dehors et c’est comme ça que l’on parle de moi dans un livre que n’importe qui peut acheter. C’est un manque de respect total. J’ai décidé de rejoindre Le Puy Foot 43 qui m’a témoigné sa volonté de m’avoir dans son effectif et je les en remercie. Je vais me donner à fond pour ce nouveau club qui me fait confiance. Par ce communiqué, je ne souhaite pas dégrader l’image du club avec lequel j’ai vécu de belles choses, j’ai simplement voulu relater des faits et comportements de certaines personnes. Je remercie tous les supporters qui étaient présents lors de mes 7 années à l’ASSE et qui m’ont toujours soutenue. Je souhaite une bonne saison à mes anciennes coéquipières. "
Par Eric le mardi 22 octobre 2019 Ã 8h1.
Modifié le mercredi 23 octobre 2019 à 9h5.