Voici le vip demandé :
Personnalité : André LAURENT
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André Laurent
André Laurent est né à Firminy (Loire) le 1er mai 1938. Ingénieur de formation, il crée sa société en 1967, André Laurent SA, qu’il spécialise dans la fabrication de boulons spéciaux. Elle prospère rapidement et elle devient un des leaders européens à la fin des années 70.
UNE ASCENSION FULGURANTE
Fort de ses succès économiques, il acquiert une renommée certaine au sein de l’establishment Stéphanois mais il voudrait avoir encore plus de reconnaissance. Poussé par des amis intéressés, il observe d’un œil acéré les déboires de l’ASSE qui se débat dans cette triste affaire de la caisse noire au début des années 80. C’est l’occasion rêvée pour monter une liste alternative lors de l’assemblée générale du club le 5 décembre 1982. Roger Rocher y fait un one-man-show aussi mémorable que détestable, ce qui lui permet d’installer un de ses amis à la présidence, Pierre Fourneyron, ce dernier jetant l’éponge dans la foulée. C’est un autre disciple de l’homme à la pipe, Paul Bressy, qui prend les commandes.
Entre-temps, André Laurent devient un interlocuteur crédible et le 11 avril 1983, André Buffard le fait même entrer au Conseil d’administration avec deux de ses partisans pour insuffler du sang neuf. Le 3 mai 1983, Paul Bressy est mis en minorité et il doit démissionner espérant être réélu immédiatement. A sa grande surprise, il est victime de tractations en coulisse qui propulsent à la présidence André Laurent dont l’ascension est fulgurante.
Intervention d’André Laurent à l’Assemblée générale
Peu impressionné par la charge qui lui incombe, comme s’il avait préparé son coup à l’avance, il s’affranchit aisément de la tutelle d’André Buffard et il prend son indépendance par rapport à Roger Rocher qu’il a pris soin de rencontrer. Les deux hommes ont peut-être sous-estimé cet adversaire, pensant qu’ils pourraient facilement le manipuler. Toutefois, ils le laissent agir à sa guise et André Laurent s’attelle à la lourde tâche de sauver le club avec conviction et enthousiasme. Ses premières décisions sont sans équivoques. Il limoge l’entraîneur de l’équipe première, Guy Briet et fait revenir Bernard Gardon licencié par l’ancienne équipe. C’est un message fort pour faire comprendre qu’il est devenu le seul maître à bord. Il entreprend de moderniser le club et il envisage de créer des services inédits comme la création d’une cellule marketing, des loges et des prestations de grands standings car il doit très vite trouver des ressources supplémentaires afin de renflouer une trésorerie exsangue.
Il est malheureusement rattrapé par les réalités du terrain et par une situation financière désastreuse qui l’oblige à laisser partir certains de ses meilleurs éléments comme Battiston, Janvion, Roussey, Paganelli ou encore Genghini. Il nomme au poste d’entraîneur Jean Djorkaeff, le père de Youri futur champion du monde, pour la saison 1983-84. Le technicien est obligé de lancer de nombreux jeunes mais les résultats ne suivent pas. Au soir d’un 0-7 sanglant à Bordeaux lors de la 33e journée, André Laurent décide de le débarquer et de le remplacer par Robert Philippe. En même temps, il a la curieuse idée de menacer les cadres de l’équipe ce qui a pour effet d’envoyer l’ASSE en 2e division après un barrage perdu contre le RC Paris. Tout un peuple, au soir de la défaite face au Racing à Geoffroy-Guichard, pleure à chaudes larmes une descente vécue comme une catastrophe nationale.
OBJECTIF EUROPE
André Laurent n’a pas le temps de s’apitoyer sur son sort et il prend alors des décisions techniques de premier plan. Il fait venir Henrik Kasperczak qu’il intronise à la tête de l’équipe professionnelle et il obtient la signature d’un attaquant de race, le Camerounais Roger Milla. La première saison, l’ASSE rate la remontée d’un souffle malgré une série impressionnante de 24 matches sans défaite. Ce n’est que partie remise car la saison suivante, les Verts obtiennent facilement leur sésame pour l’échelon supérieur.
Les retrouvailles avec la D1 sont délicates. Le Saint-Etienne de Kasperczak se maintient en obtenant une pénible 16e place, essentiellement grâce à une défense de fer qui n’a encaissé que 5 buts à domicile en championnat. André Laurent ne peut se satisfaire de ce résultat car il souhaite plus de spectacle notamment à Geoffroy-Guichard. C’est pour cette raison qu’il ne poursuit pas sa collaboration avec le technicien polonais. En juin 1987, le président officialise alors le retour de l’enfant prodigue, Robert Herbin. Il était précédé par celui de Pierre Garonnaire qui avait repris son poste en 1985. Cela n’en reste pas moins un véritable coup de tonnerre dans le Forez et un formidable pari.
Il est sur le point de le gagner dès la première saison car malgré une lourde défaite à Laval à l’entame du championnat (0-4), les Verts de « Robby » finissent 4e. Ce n’est malheureusement pas suffisant pour décrocher l’UEFA. Ce parcours reste cependant le meilleur résultat car la suite est moins reluisante. Bien vite des dissensions apparaissent dans l’encadrement notamment entre Herbin et le directeur sportif, Bernard Bosquier. André Laurent l’avait fait venir afin de doter le club d’un maillon supplémentaire sensé apporter plus d’expérience vers un objectif enfin avoué : la Coupe d’Europe.
Malgré une demi-finale de coupe de France perdue à domicile contre le Montpellier d’Eric Cantona, Saint-Etienne est toujours à la recherche de son passé et au lendemain de cette cruelle défaite, le 25 mai 1990, André Laurent licencie à son tour Robert Herbin. Ces échecs répétés fragilisent sa position envers le partenaire historique de l’ASSE, le groupe Casino, qui commence à s’impatienter. D’autres décisions suscitent également l’étonnement comme le refus d’embaucher Aimé Jacquet à la formation alors que ce dernier avait fait part de son intérêt. Traité d’ « Has been » par un président peu inspiré sur ce coup, il ira tenter sa chance ailleurs pour le plus grand bien du football français.
André Laurent se tourne vers l’adjoint de Herbin, Christian Sarramagna qu’il nomme entraîneur. Il ne peut réaliser des miracles et il obtient un maintien difficile pour ses débuts. Dix-huitième à trois journées de la fin, les Verts terminent par trois victoires consécutives salvatrices. Paradoxalement, l’avenir incertain de l’équipe qui a longtemps flirté avec la relégation lui permet de rempiler pour une saison supplémentaire car Jacques Santini, contacté, avait jusqu’au 15 avril 1991 pour dénoncer son contrat avec Lille. Il a préféré attendre un an puisque c’est lui qui prend la succession en 1992.
UNE CHUTE SPECTACULAIRE
Les rapports d’André Laurent avec Casino continuent de se détériorer. Le groupe a décidé d’indexer sa dotation en fonction des résultats sportifs, une façon à peine déguisée de marquer sa désapprobation avec la politique mise en place. Le président accélère alors ses recherches pour trouver d’autres sources de financement. Il multiplie les contacts et certains d’entre-eux apparaissent comme autant d’actes de défi envers la maison mère. Celui noué, par exemple, avec un homme d’affaire libanais, un certain Charly Chaker à la fin de l’année 1992 apparaît même comme une véritable déclaration de guerre. Précédé d’une réputation peu flatteuse, son arrivée planifiée au sein du club fait grincer des dents. Ces tractations plus ou moins secrètes décontenancent également les supporters inquiets sur les perspectives d’avenir mal identifiées. André Laurent semble de plus en plus fragilisé et il a de plus en plus de mal à sauver son siège devenu éjectable.
L’association Laurent-Chaker,l’initiative de trop ?
De son côté, Jacques Santini a bien du mérite de pouvoir travailler dans cette ambiance délétère. Il parvient toutefois à tirer son épingle du jeu. Son équipe reste toujours classée parmi les dix meilleures du championnat et à la lutte pour une place européenne. Le 11 mai 1993, l’ASSE parvient même à se qualifier pour les demi-finales de la coupe de France en éliminant la prestigieuse équipe de l’OM après prolongations (2-1). Cet exploit face au futur vainqueur de la ligue des champions les incite à délaisser le championnat sanctionné par une dernière défaite à Paris. Classés 7e, les Verts laissent le dernier strapontin pour l’UEFA à Auxerre à cause d’une différence de buts moins bonne. Il leur reste plus que la coupe de France pour arriver au but.
La demi-finale de la coupe de France à Geoffroy-Guichard face à Nantes le 5 juin 1993 est également le match de la dernière chance pour André Laurent. En effet, le groupe Casino est passé à la vitesse supérieure. Par l’intermédiaire de Jean-Michel Larqué, son bras armé, le bilan du président de l’ASSE est descendu en flammes lors de l’émission TéléFoot le matin même de la demi-finale. Le message est clair : les jours d’André Laurent sont comptés et seule une victoire en coupe pourrait le maintenir à son poste. A neuf minutes du terme, Nicolas Ouedec, le Nantais, anéantit les derniers espoirs du président qui doit s’avouer vaincu. Le 10 juin 1993, il démissionne après dix ans de pouvoir qui le laisseront sans forces.
Cette sortie de route prématurée ne saurait faire oublier qu’André Laurent est celui qui aura remis les Verts sur de bons rails. Sans son intervention, on peut même envisager que l’AS Saint-Etienne aurait pu connaître la même triste fin qu’un autre grand club français : le Stade de Reims. A ce titre, il mérite amplement de figurer parmi ceux qui auront marqué l’histoire de l’ASSE.