Voici le vip demandé :
Personnalité : Aimé JACQUET
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Aimé Jacquet a eu une carrière marquée par le sceau de l’intelligence et de l’abnégation. Il est considéré comme un fidèle serviteur jugé à juste titre indispensable par des entraîneurs aussi réputés et intransigeants que Jean Snella et Albert Batteux. Il a été un titulaire indiscutable au poste de milieu récupérateur au sein du collectif stéphanois qui a dominé le football français dans les années 60.
UN JOUEUR DE DEVOIR INDISPENSABLE
Aimé Jacquet est né le 27 novembre 1941 à Sail-sous-Couzan, une petite commune de la Loire située à environ 50 kilomètres de Saint-Etienne où en étant fils de boucher, il a vécu au rythme de la nature et des valeurs ancestrales qu’elle a toujours véhiculé : simplicité, générosité et respect des autres. S’il n’avait pas embrassé une carrière de footballeur professionnel, il aurait pu devenir un paysan tout à fait honorable.
Toutefois, le virus du football l’a vite rattrapé et il a signé sa première licence au club de son village, l’US Couzan où il a progressivement gravi tous les échelons jusqu’à l’équipe première. Il jouit très rapidement d’une belle réputation au point d’intégrer les Séniors alors qu’il a été surclassé deux fois puisque faisant partie des cadets. Cependant, cela ne suffit pas pour intéresser les recruteurs stéphanois qui sont venus le superviser. Pierre Garonnaire, qui est venu le voir plusieurs fois, le trouvait trop lent pour un attaquant, poste qu’il occupait à cette époque.
C’est Monsieur Hernandez, le responsable de la réserve pro de l’AS Saint-Etienne qui lui fait confiance et lui demande de venir chez les Verts où il ne devient pas professionnel pour autant. A partir de la saison 1959-60, il est un simple amateur évoluant à l’ASSE et il découvre au même moment le monde ouvrier en s’installant à Saint-Chamond. En plus d’y trouver sa future femme, il apprend à connaître tout un univers qui finira par le marquer à jamais. L’entraide, la solidarité, la complicité sont des vertus dont il comprend tout leur sens au milieu de ses collègues de travail qui vont jusqu’à le couvrir lorsqu’il s’agissait de quitter son poste plus tôt pour se rendre à ses séances d’entraînement. Il en éprouvera une gratitude et une reconnaissance éternelle envers ses compagnons qui auront tout fait pour qu’il puisse assouvir sa passion. Naturellement, et on le comprendra aisément, sa carrière naissante est forcément handicapée par cette situation inconfortable. Sa progression est, de plus, freinée par deux événements indépendants.
Un joueur de devoir exemplaire
Il est victime d’une myélite virale, une maladie de la moelle osseuse, qui le tient éloignée des terrains pendant plusieurs semaines et il doit accomplir ses obligations militaires. En cette période trouble de fin de guerre d’Algérie, il est sollicité à l’issue de ses classes qu’il débute en juin 1961 pour s’occuper, à sa grande surprise, de l’équipe de football de son régiment, le 22e bataillon de chasseurs alpins de Nice. D’une manière inattendue, cette demande, outre le fait qu’elle le dispense d’être incorporé dans une compagnie qui aurait pu être confrontée aux hostilités au-delà de la méditerranée, lui fait découvrir le plaisir de transmettre ses connaissances à toute un groupe avec lequel il obtient des résultats convaincants (champion de la région à Marseille). Sa conviction semble déjà faite : il a un avenir dans cette voie-là . Pour garder la forme, il signe également, avec l’autorisation de l’ASSE, une licence à l’ASPTT de Nice ce qui lui permet de garder le contact avec le terrain. A son retour d’armée, il a toutefois du mal à s’imposer dans l’équipe première car s’il a effectué ses débuts en championnat le 4 décembre 1960 à Limoges et marqué son premier but le 28 mai 1961 contre Toulouse, il n’a joué, par exemple que deux matches de championnat lors de la saison 1963-64, même si au même titre que ses partenaires, il obtient le premier de ses cinq titres de champion de France.
DEUX ENTRAINEURS A L’INFLUENCE CONSIDERABLE
Par contre, à partir de l’exercice suivant, Jean Snella l’incorpore de plus en plus dans son effectif et comme conséquence directe de cette confiance grandissante dont il bénéficie, il signe son premier contrat professionnel à l’AS Saint-Etienne abandonnant sans regret cette double vie d’ouvrier footballeur. La rencontre avec son entraîneur aura une importance capitale pour la suite de sa carrière. Intimidé, subjugué, admiratif, Aimé Jacquet tombe littéralement sous le charme et il devient progressivement un des éléments majeurs du groupe stéphanois. Milieu de terrain de devoir, il rassure par sa présence et son jeu simple, une équipe naturellement tournée vers l’offensive. Indispensable, il bonifie la valeur du collectif stéphanois par son talent à colmater les brèches et à ressortir les ballons proprement à destination de ses attaquants. Il prend des lors une part prépondérante à l’acquisition d’un nouveau titre de champion de France en 1967, le dernier de l’ère Snella.
But de Jacquet contre Nantes en 1967-68
L’arrivée d’Albert Batteux, loin d’inquiéter son nouveau statut, confirme au contraire ses prérogatives. Le nouvel entraîneur peut même s’appuyer sur ses capacités quasiment les yeux fermés et il en profite pour faire reculer Robert Herbin d’un cran en défense centrale estimant plus profitable son association avec Bernard Bosquier. Trois nouveaux titres et deux Coupes de France viennent alors compléter un palmarès déjà bien fourni. Il profite de l’hégémonie stéphanoise tout au long de cette période, une domination matérialisée par des résultats à lesquels il a apporté une pierre efficace, pour obtenir deux sélections en équipe de France qui, sa modestie dut-elle en souffrir, ne doivent rien à personne.
C’est la consécration pour un joueur finalement révélé sur le tard et dont on aura douté de ses capacités à ses débuts. Lui-même aura beau avouer qu’il n’a été qu’un honnête professionnel, beaucoup aurait aimé avoir la carrière qui a été la sienne. Toutefois en 1970, il est victime d’une grave blessure au talon d’Achille qui a nécessité deux interventions consécutives et qui l’a laissé sur le flan pendant vingt-deux mois. Pendant tout ce temps, il a suivi de loin l’évolution de sa formation préférée qui a connu des vicissitudes dont elle se serait bien passée et à son retour en 1972, c’est un tout autre contexte qui s’offre à lui. Robert Herbin a succédé à Albert Batteux au poste d’entraîneur, ce dernier ayant eu également une très grande influence dans son approche résolument moderne et communicative du football. Une nouvelle génération est résolument en train de prendre le pouvoir et les Synaeghel, Bathenay ou encore Santini le poussent inexorablement vers la sortie. Néanmoins, il s’était juré de revenir sur le terrain et de rejouer au football à force d’obstination, de conviction et d’opiniâtreté, une marque de fabrique qui sera la base de ses réussites futures. C’est avec fierté qu’il réussit son pari devenant un relais essentiel pour Herbin à défaut d’être régulièrement titularisé. Il l’aide du mieux qu’il le peut en essayant de faciliter la tâche d’un entraîneur qui débute dans le métier en l’assistant au quotidien.
UNE RECONVERSION REUSSIE
Il sent cependant qu’il peut apporter plus à une équipe professionnelle alors qu’à Saint-Etienne, il comprend que son temps de jeu sera de plus en plus limité malgré une carte de visite forte de 190 matches de championnat et 9 rencontres de coupe d'Europe disputées sous le maillot vert. Il accepte ainsi la proposition de l’Olympique Lyonnais qui lui offre des garanties suffisantes. Il peut ainsi terminer sa carrière sereinement et entamer sa reconversion en occupant en 1976 le poste d’entraîneur de l’OL, remplaçant en fin de saison Aimé Mignot. Bien qu’entamée dans la précipitation, cette nouvelle orientation n’est que la suite logique des enseignements qu’il a reçu de la part de Jean Snella et d’Albert Batteux. Première expérience à ce niveau et première réussite car il parvient à éviter la relégation dans des conditions difficiles. Les années suivantes, il tient le club à bout de bras et ses compétences commencent à être reconnues notamment par un certain Claude Bez qui veut monter à Bordeaux une équipe compétitive. Il lui confie la direction du groupe Bordelais avec lequel Jacquet va obtenir tous les lauriers (Championnat de France et Coupe de France) et même si la séparation en 1989 sera délicate, son aventure en Gironde lui confère une légitimité méritée. Ses expériences suivantes, à Montpellier et à Nancy, bien que moins significatives lui ouvrent les portes de l’équipe de France qu’il intègre en devenant l’adjoint de Gérard Houllier. Il a accepté cette fonction alors qu’il aurait pu (c’était son souhait) s’occuper du centre de formation de l’AS Saint-Etienne, un poste qui l’a fortement intéressé. Malheureusement, André Laurent, que l’on a connu plus perspicace, a refusé de lui attribuer cette charge, préférant d’autres candidatures.
Finalement, il faut lui rendre grâce de cette décision car en 1993 alors que la France connaissait un échec retentissant ne parvenant pas à se qualifier pour la coupe du Monde aux Etats-Unis à la suite d’un France-Bulgarie aux allures de Waterloo, c’est Aimé Jacquet qui est choisi pour succéder à Gérard Houllier piteusement démissionnaire. Il peut alors avoir rendez-vous avec l’histoire car s’il a affirmé dès sa prise de fonction en 1994 que les Bleus seraient champion du monde en 1998, bien peu aurait parié sur ses chances de succès malgré une première échéance réussie avec une demi-finale atteinte lors de l’Euro 96 en Angleterre.
Les deux dernières années de son mandat auront même été caractérisées par au minimum un scepticisme ambiant voire une hostilité déclarée notamment de la part du Quotidien Sportif « l’Equipe » qui n’aura de cesse, selon ses propres dires, de lui saboter son travail.
Néanmoins, à force de persuasion, en puisant dans toutes ses influences n’hésitant pas à avouer combien les leçons de Snella et de Batteux lui ont été profitables, imposant ses idées avec conviction, il s’est installé sur le toit du monde un certain 12 juillet 1998.
Il peut alors tirer sa révérence fier du travail accompli et il obtient le poste de directeur technique national où il milite pour la formation sous toutes ses formes et une meilleure reconnaissance du football féminin. Huit ans après, en 2006, il prend une retraite méritée et comme il se définit lui-même, en tant que simple serviteur du football, il a connu un parcours exceptionnel mais qui ne doit rien au hasard.